"On ne revient jamais vraiment de nos voyages initiaux, ceux qui font bifurquer une trajectoire. Ils changent à tout jamais l'homme qui n'aura par la suite qu'une seule terreur profonde, celle de devenir fonctionnaire. Voyager, c'est une quête d'intensité. Refuser de se soumettre à l'ennui. S'autoriser à devenir une nouvelle personne à chaque étape. Les couches du vécu accumulées favorisent l'acquisition permanente de nouvelles compétences."
Briser la glace de Julien Blanc-Gras (journaliste globe trotter né en 1976 à Gap) est un court récit de voyage au Groenland à bord de l'Atka, un navire brise glace dont le nom signifie "gardien des esprits" en langue inuite. L'auteur y croque avec beaucoup d'humour la vie arctique, soixante-dix ans après l'expédition polaire de Paul-Emile Victor (sa cabane, construite en 1948, était un camp de base pour mener ses observations scientifiques sur la calotte glacière). J'ai apprécié la rencontre avec les Vikings disparus (morts à cause de la faim, du froid et de la peste : "Quand on dévaste la nature et qu'on néglige les sagesses autochtones, on court à sa propre perte") auxquels ont succédé les habitants actuels, partagés entre la pêche, la chasse aux phoques et les tracas de la modernité. J'ai été étonnée de l'incroyable classification des icebergs, des hordes de passagers de croisières venus toucher du doigt les effets du changement climatique et de cette étrange hystérie appelée amok (l'écrivain autrichien Stefan Zweig a d'ailleurs consacré une nouvelle du même nom à ces crises de démence aussi violentes que spontanées). Mais ce qui m'a le plus surprise, est cette soudaine envie de partir à mon tour affronter le froid - température que je redoute pourtant au plus haut point ! - pour assister au spectacle sublime d'une aurore boréale ou d'un ballet de baleines.
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A voir jusqu'au 13 janvier 2019 !
De pôle en pôle, le monde qui disparait
Photographies de Sebastien Copeland sur les grilles du Jardin du Luxembourg
Fils du chef d'orchestre Jean-Claude Casadesus et d'une mère d'origine anglaise, l'explorateur Sébastian Copeland, diplômé de l'université d'UCLA en Californie (langues et sciences de la Terre), est un sportif de haut niveau devenu bouddhiste, un réalisateur de clips et de films publicitaires ainsi qu'un photographe primé dans le monde entier. Il vit à Los Angeles, est l'ambassadeur de la marque Napapijri (groupe VF), et siège au conseil de direction de Global Green USA : une organisation affiliée à la Croix verte internationale qui s'occupe notamment de la reconstruction durable de la Nouvelle-Orléans, du "Fonds scolaire mondial" et des "Ecoles vertes".
L'aventurier a sélectionné 80 clichés emblématiques de vingt années d'expédition de l'extrême afin de partager avec nous les paysages de l'Arctique, de l'Antarctique et du Groenland (il a parcouru huit mille kilomètres à pied dans les régions polaires). Devenu "l'avocat des pôles" outre-Atlantique, il s'est frotté aux mêmes désillusions que le Petit Prince de Saint-Exupéry : "Ma vision de l'être humain n'est pas judéo-chrétienne. Je le trouve ingénieux, mais il se comporte comme un virus : il se multiplie, détruit son environnement pour survivre." Son implication dans la protection de l'environnement est probablement l'héritage de l'esprit unificateur de sa grand-mère, la comédienne Gisèle Casadesus, doyenne des sociétaires de la Comédie Française, décédée en septembre 2017 à cent-trois ans.
L'exposition plaidoyer
Baie de Qaanaq dans le nord du Groenland le 19 juin 2010 Deux décennies plus tôt, à la même date, ce site était encore gelé |